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Syriza, Podemos. Retour de la démocratie ou coup d’épée dans l’eau ?

Après Syriza en Grèce, la percée électorale de Podemos en Espagne constitue la traduction politique du refus des politiques d’austérité menées dans les pays du sud de la zone euro. Cependant, même si l’émergence de ces nouveaux partis a bouleversé le système politique en place depuis plusieurs décennies en Grèce et en Espagne, il n’est pas certain qu’elle puisse entrainer une modification des politiques suivies dans ces pays. Cette victoire risque de se heurter au «triangle d’incompatibilité de Rodrik »

 

En 2000, l’économiste turc Dani Rodrik énonçait un trilemme selon lesquel il serait impossible de concilier démocratie, souveraineté des Etats-nations et mondialisation. Appliqué à l’Union européenne, cela signifierait l’impossibilité d’avoir à la fois :

-       l’Union économique et monétaire (pôle 1)

-       le cadre national pour l’exercice de la vie politique (pôle 2)

-       la démocratie (pôle 3)

 

Il est possible de concilier 2 pôles du triangle mais pas les 3.

 

L’articulation des pôles 2 et 3 correspond à ce que Rodrik appelle le « compromis de Bretton Woods », du nom de la ville où furent signés en 1944 les accords organisant le système monétaire international. Cette expression fait référence à une organisation basée sur une faible intégration financière et des possibilités d’ajustements monétaires (dévaluations et réévaluations) permettant des politiques nationales spécifiques, tout en évitant le protectionnisme et le cloisonnement monétaire des années 1930.

L’articulation des pôles 1 (Union économique et monétaire) et 3 (démocratie) est possible à condition que le cadre d’exercice de la vie politique soit l’Union européenne dans son ensemble. Il s’agit de la configuration « fédéralisme »

L’articulation des pôles 1 et 2 correspond à la configuration appelée par Rodrik « camisole de force dorée ». L’intégration économique et monétaire aboutit à des prises de décision effectuées dans une logique supranationale alors que la démocratie s’exerce dans un cadre national. Cela aboutit de fait à une coupure entre le processus de prise de décision, y compris lorsqu’il est le fait des dirigeants des Etats-nations, et le processus électoral.

 

Par ailleurs cette coupure est source de tensions, d’autant plus fortes qu’avec les politiques d’austérité menées dans certains pays depuis 2009, la « camisole de force » n’est plus dorée.

A cet égard, l’émergence de nouveaux partis politiques tels Syriza, Podemos ou bien dans une moindre mesure le mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo en Italie semble constituer à la fois la manifestation de ces tensions et une tentative de retour vers le pôle « démocratie »

Pour que ce retour soit effectif, il faudrait cependant changer de configuration. L’option « fédéralisme » semble hors de portée. Quant à la configuration « compromis de Bretton Woods », elle supposerait la sortie de la zone euro, option refusée par la plupart des dirigeants et des opinions publiques,  y compris par les dirigeants des nouveaux partis tels Syriza et Podemos.

Sauf à supposer qu’il soit possible d’imaginer une quatrième configuration au trilemme de Rodrik, le problème à résoudre à l’heure actuelle ressemble fortement à celui de la quadrature du cercle.

 

Bernard Schwengler

Ovipal

30 mai 2015.



30/05/2015
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