Le Front national aux européennes : victime de la faible participation électorale ?
C’est aux européennes de 1984 que le Front national a effectué sa première percée électorale, avec 11% des suffrages exprimés an niveau national, et 12,5% en Alsace. Depuis cette date pourtant, c’est aux européennes qu’il réalise ses scores les moins élevés, comparativement aux autres types de scrutin.
En fait, depuis 1984, la hiérarchie dans les niveaux de vote Front national en fonction du type d’élection correspond aux différences dans les niveaux de participation électorale
Taux de participation et score du Front national de 1984 à 2012 en Alsace[1]
(en pourcentage)
Présidentielles Taux de participation Score du Front national
P88 82,8 21,8
P95 79,5 25,4
P2002 73,4 23,5
P2007 83,6 13,6
P2012 79,6 22,1
Législatives
L88 62,7 15,1
L93 67,2 14,7
L97 67,4 21
L2002 60 12,4
L2007 55,9 5,8
L2012 54,6 17,4
Régionales
R92 67,1 17,3
R98 54 20,6
R2004 59,5 18,6
R2010 43,4 13,5
Européennes
E84 51,3 12,5
E89 48 13,6
E94 51 14,1
E99 43 8,5
E2004 38,7 13,2
E2009 39,2 8,1
En raison des enjeux et de la durée de la campagne électorale, les élections présidentielles se traduisent par une mobilisation électorale forte, autour de 80% des inscrits, plus élevée que pour les autres types d’élections. Pour ces élections, des citoyens inscrits sur les listes électorales mais faiblement politisés et présentant une participation électorale irrégulière, vont voter alors qu’ils ont tendance à s’abstenir lors des autres élections. Ce surplus de mobilisation bénéficie de façon principale au Front national, où ses scores dépassent les 20% des voix (à l’exception de la présidentielle de 2007). A l’inverse, une faible participation électorale se traduit par des résultats beaucoup plus bas pour le Front national. C’est tout particulièrement le cas aux européennes, où son score le plus élevé fut de 14,1% des voix (aux européennes de 1994). Quant aux élections législatives et régionales, elles se situent dans une positon intermédiaire entre les présidentielles et les européennes, à la fois du point de vue de la participation électorale que du point de vue des scores obtenus par le Front national. Ces fortes fluctuations du vote Front national en fonction du niveau de participation électorale résultent du fait que son électorat appartient aux catégories sociales dont la participation électorale est la moins élevée et la plus irrégulière (électorat jeune, électorat de milieu populaire)
L’évolution du niveau de vote Front national dans le temps se mesure par conséquent dans le cadre de chaque type d’élection. A partir de 1984, le vote Front national fut dans un premier temps dans une dynamique d’augmentation et il atteignit ses scores les plus élevés pendant la période allant de 1994 à 1998, pour chaque type d’élections.[2] A partir de cette date, il subit deux périodes de contreperformances passagères :
- la contreperformance des européennes de 1999 (8,5% des voix) suite à la scission entre le Front national et le Mouvement national républicain de Bruno Mégret.[3] Le fait que le Front national sortit vainqueur de sa confrontation avec le MNR lui permit de retrouver à partir de 2002 des niveaux de vote proches des niveaux qu’il avait atteint avant la scission pour chaque type d’élections.
- L’échec électoral de la présidentielle de 2007 (13,6% des voix) qui se renouvela aux législatives de 2007 (5,8% des voix) et aux européennes de 2009 (8,1% des voix).
A partir de 2012 cependant, le Front national a retrouvé les scores électoraux élevés qui étaient les siens avant 2007 (22,1% à la présidentielle de 2012 et 17,4% aux législatives de la même année)
A cet égard, le score du Front national aux européennes de 2014 sera à comparer, non pas à son score des européennes de 2009 (8,1% des voix), qu’il va très certainement dépasser, ni à celui de la présidentielle de 2012 (22,1% des voix) mais à ceux des européennes de 2004 et de 1994 (respectivement 13,2% et 14,1% des voix)
Bernard Schwengler
OVIPAL
[1] Le taux de participation correspond au rapport « nombre de votants sur nombre d’inscrits sur les listes électorales ». Le score du Front national correspond au rapport « nombre de voix obtenues sur nombre de suffrages exprimés ».
[2] Dans le cadre de chaque type d’élections, il atteignit ses scores les plus élevés aux européennes de 1994 (14,1% des voix), à la présidentielle de 1995 (25,4% des voix), aux législatives de 1997 (21%) et aux régionales de 1998 (20,6%)
[3] Aux européennes de 1999, le Front national tomba à 8,5% des voix alors que le MNR eut 4,5% des voix.
A découvrir aussi
- Elections européennes : pas de panique !
- Le vote Front national aux européennes 2014 : prélude à de nouvelles progressions ?
- Pourquoi les électeurs votent-ils pour le Front national ? Le rôle des « failles identitaires »
Inscrivez-vous au site
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 897 autres membres