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Primaire de la droite et du centre : quels candidats soutiennent les élus alsaciens ?

En principe, le recours à une élection primaire pour la désignation d’un candidat à la présidentielle consiste à solliciter le point de vue de l’ensemble des sympathisants d’un courant politique donné et va par conséquent bien au-delà d’une consultation interne à un parti politique. Il n’est cependant évidemment pas interdit aux cadres du parti ainsi qu’aux élus locaux de faire connaître leurs préférences personnelles, dans la mesure où ils sont censés être des faiseurs d’opinion. Et à cet égard, les critères qui guident leur choix sont variés et nombreux. Certains se déterminent en fonction de leur proximité idéologique avec tel ou tel candidat.

 

D’autres en revanche adoptent un positionnement plus politique et visent, en échange de leur soutien, une promotion politique. Et il peut exister une certaine contradiction entre ces deux logiques. En effet, dans la mesure où dans un second temps le vainqueur de la primaire sera amené à rassembler et par conséquent à s’entourer également de membres représentant d’autres sensibilités, une stratégie consistant à soutenir un candidat d’une autre sensibilité que la sienne peut s’avérer être une stratégie gagnante.

 

A cet égard, pour prendre un exemple, dans la perspective d’une nomination au poste de Premier ministre, le soutien de l’ex-chiraquien François Baroin à Nicolas Sarkozy, plutôt qu’à Alain Juppé, ex-chiraquien lui-même, est tout à fait cohérente. La difficulté cependant pour une logique de positionnement politique réside dans le fait de savoir gérer une certaine flexibilité idéologique sans pour autant donner l’impression de renier ses convictions.

 

C’est en fonction de cette grille d’interprétation que nous analysons les prises de position des élus alsaciens à la primaire de la droite et du centre.

 

Alain Juppé.

 

Alain Juppé présente l’avantage d’être à la fois un ancien fidèle de Jacques Chirac et d’avoir adopté pour le présent un positionnement plus centriste que celui de la plupart de ses concurrents. Cela se traduit pour lui par le soutien en Alsace de nombreux élus Les Républicains qui étaient membres du RPR avant 2002, les députés Arlette Grosskost et Jean-Luc Reitzer, le sénateur André Reichardt, le conseiller départemental Bernard Fischer, mais également d’anciens membres de l’UDF, dont notamment Yves Bur et Fabienne Keller.

 

En ce qui concerne Fabienne Keller, son soutien à Alain Juppé correspond à la fois à une logique de proximité idéologique et de positionnement politique dans la mesure où il est probable que si Alain Juppé est élu président de la République, elle entrera au gouvernement. Il faudra cependant qu’elle fasse attention de ne pas devenir une « juppette » (cf. annexe 1)

 

François Fillon

 

Parmi les soutiens à François Fillon on trouve principalement des députés qui en 2012 l’avaient rejoint dans la constitution du groupe autonome « Rassemblement UMP » à l’assemblée nationale à l’époque de la guerre Copé-Fillon pour l’élection à la présidence de l’UMP (cf. annexe 2). Il s’agit des députés Jean-Louis Christ, Patrick Hetzel, Frédéric Reiss, Sophie Rohfritsch, Michel Sordi et Claude Sturni. Par ailleurs François Fillon bénéficie également du soutien de Gilbert Meyer, le maire de Colmar.

 

Parmi l’ensemble de ces soutiens, c’est évidemment celui de Patrick Hetzel, député de la circonscription de Saverne qui mérite le plus l’attention. Avant d’entrer en politique (en 2012), Patrick Hetzel avait effectué une carrière d’universitaire et de haut fonctionnaire. Il avait été nommé en février 2005 recteur de l’académie de Limoges par François Fillon (qui était ministre de l’Education nationale) et il demeura à ce poste jusqu’en mai 2007, date à laquelle François Fillon, devenu Premier ministre, le fit entrer dans son cabinet en tant que conseiller chargé des questions d’éducation et d’enseignement supérieur. Et en 2008 il fut nommé directeur général de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle au ministère de l’enseignement supérieur. Il est par conséquent très probable qu’en cas de victoire de François Fillon, Patrick Hetzel sera appelé à de hautes fonctions.

 

Nicolas Sarkozy

 

Parmi les soutiens alsaciens à Nicolas Sarkozy se trouvent les sénateurs René Danesi et Catherine Troendlé ainsi que Philippe Richert et Jean Rottner, le maire de Mulhouse. En ce qui concerne Philippe Richert et Jean Rottner, qui l’un et l’autre ont commencé leur carrière politique dans le centrisme alsacien, on peut difficilement dire que leur choix pour Nicolas Sarkozy, qui dans cette primaire a adopté un positionnement anti-centre marqué, corresponde à une logique de proximité idéologique.

 

En 2012, au moment de la guerre Copé-Fillon, Philippe Richert soutenait François Fillon. Pour la primaire, il décida de soutenir l’un des deux candidats susceptibles selon lui de l’emporter. Il opta au bout du compte pour Nicolas Sarkozy, en échange d’une promesse de poste dans le futur gouvernement, alors qu’Alain Juppé ne lui avait rien promis. Le soutien de Jean Rottner quant à lui correspond à une logique de reconnaissance. C’est à Nicolas Sarkozy qu’il doit sa nomination au poste de maire de Mulhouse en 2010. On se souvient en effet qu’en 2007, Jean-Marie Bockel, alors maire de Mulhouse et membre du parti socialiste, avait été nommé ministre par Nicolas Sarkozy dans le cadre des nominations dites d’ouverture. Aux municipales de l’année suivante, il fut réélu maire de Mulhouse, grâce au soutien de l’UMP, avant de démissionner en 2010 et de laisser sa place à son premier adjoint Jean Rottner.(cf. annexe 3).

 

Par ailleurs la proximité entre Philippe Richert et Jean Rottner va au-delà de la primaire puisqu’elle concerne également leurs positionnements respectifs au sujet de la réforme territoriale. A l’automne 2014, Jean Rottner lançait une pétition contre le projet de grande région alors que Philippe Richert prenait la tête de la mobilisation contre ce projet, avant que l’un et l’autre ne se rallient à la grande région pour en occuper les postes respectivement de vice-président et de président.

 

Bruno Le Maire, Jean-François Copé et Nathalie Kosciusko-Morizet

 

Bruno Le Maire bénéficie du soutien de Frédéric Biery et d’Eric Straumann, président des conseils départementaux respectivement des Bas-et-Haut-Rhin ainsi que de Guy-Dominique Kennel, ancien président du conseil départemental du Bas-Rhin et actuel sénateur. Il bénéficie également du soutien du député Antoine Herth. Jean-François Copé est soutenu par Laurent Furst, député et auteur de la pétition « Rendez-nous l’Alsace », sans qu’il n’y ait de lien entre ce soutien et cette pétition. Quant à Nathalie Kosciusko-Morizet, elle a le soutien du député Jean-Louis Christ.

           

Dans la mesure cependant où ces trois candidats n’ont pratiquement aucune chance d’être qualifiés, les soutiens en leur faveur correspondent nécessairement à une logique de conviction.

 

 

Le 13 novembre 2016.

 

Bernard Schwengler

OVIPAL

 

 

Annexe 1

 

Le terme "Juppette" fut utilisé en 1995 pour désigner les 12 femmes ministres nommées  dans le gouvernement Juppé sur des postes qui n’étaient pas de vrais ministères, et dont 8 furent remerciées 6 mois plus tard

 

Annexe 2

 

Le Rassemblement UMP avait été crée le 27 novembre 2012, sous la forme d’une scission dans le groupe UMP, à l’initiative de François Fillon, pour protester contre la façon dont s’était déroulée l’élection de François Copé à la présidence de l’UMP. Il fut rejoint par 73 députés (contre 121 députés qui restèrent à l’UMP). Il fut dissous le 16 janvier 2013, suite à un accord sur la tenue d’un nouveau vote à l’UMP.

 

7 députés alsaciens avaient adhéré au « Rassemblement UMP » : Jean-Louis Christ, Arlette Grosskost, Patrick Hetzel, Frédéric Reiss, Sophie Rohfritsch, Michel Sordi et Claude Sturni.

 

Annexe 3

 

Jean-Marie Bockel, qui était maire de Mulhouse, sénateur du Haut-Rhin et membre du parti socialiste, fut nommé secrétaire d’état à la coopération et à la francophonie par Nicolas Sarkozy en juin 2007. Exclu du parti socialiste il créa en septembre 2007 le mouvement La Gauche Moderne. Candidat à sa succession aux municipales de 2008, il eut contre lui une liste socialiste dirigée par son ancien adjoint Pierre Freyburger. En revanche, il bénéficia de l’absence de liste UMP, absence qui provoqua des protestations de la part de certains élus UMP mulhousiens, dont Arlette Grosskost. Au bout du compte il fut réélu maire de Mulhouse à la tête d’une liste commune La gauche moderne-UMP-Nouveau Centre et Modem. En 2010 il démissionna, permettant ainsi à son premier adjoint Jean Rottner d’être élu maire de Mulhouse. Et il fut éjecté du gouvernement en novembre 2010.

 

Pour la primaire de la droite et du centre, Jean-Marie Bockel, désormais membre de l’UDI, s’est prononcé pour Alain Juppé.

 

 

 



13/11/2016
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