Régionales 2015 en Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine : une région toute à droite(s)
L'étude "Territoires de vie et résultats de l’élection présidentielle de 2012 en Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine. clivages" nous permet de mieux saisir au sein de la nouvelle grande région les caractéristiques électorales du vote en les reliant plus précisément à 8 grands types de qualité de vie selon les territoires. De fait, la région ne recense que 6 familles différentes de territoires sur les 8 dénombrés par l'INSEE.
Il en ressort que la droite classique (l'ex-UMP) et que la droite extrême (le RBM-FN) se disputent avec la gauche (principalement le PS) les électeurs, à la fois sur des territoires de vie ''plutôt denses en situation peu favorable'' (triple concurrence entre l'ex-UMP, le RBM-FN et le PS) et sur des territoires de vie autour des villes moyennes " offrant des emplois et des conditions de vie plutôt favorables" (double concurrence entre l'ex-UMP et le PS).
Grand écart pour la campagne électorale.
Il s'agit d'une mise en concurrence intéressante car elle se joue sur les deux fronts de la crise économique et sociale : elle affecte les cités et les grands ensembles durement touchés par la crise (le type 5, territoires de vie plutôt denses en situation peu favorable) et les villes moyennes pour l'instant encore peu touchées (le type 8, celui des territoires de vie autour des villes moyennes offrant des emplois et des conditions de vie plutôt favorables).
Ce grand écart va certainement rendre encore plus difficile pour le PS l'élaboration des grands axes de sa campagne électorale et des éléments de langage qui les accompagnent... car ils nécessiteraient à l'évidence une adaptation à des cibles électorales très opposées et dont les cadres de vie connaissent soit le chômage dans un univers dégradé d'un côté, soit la sécurité économique dans un environnement préservé.
L'affichage d'une thématique politique régionale cohérente ne sera pas aisée pour le parti actuellement au pouvoir alors que la principale ligne politique affichée consiste à le faire apparaître comme le garant de l'orthodoxie budgétaire et d'une économie ultra-libérale qui s'immisce avec d'autant plus de force dans toutes les sphères de la vie régionale ; cet affichage complexifie l'équation pour la campagne électorale du PS car ne revient-elle pas à poser différemment au niveau de la région la question de la fin « (...) d’une continuité de l'Etat protecteur à l’échelle régionale ? » (voir l'article : https://www.ovipal.com/extension-regionale-7-questions-au-moins-a-resoudre-a-tres-tres-court-terme) et dérouter une fois encore l'électorat «traditionnel » du PS ?
Des « viviers territoriaux » électoraux très disparates
Sur le plan quantitatif, quelques chiffres sont à préciser afin de comprendre les déséquilibres entre les forces politiques.
La répartition des populations (mesurées par les inscrits) montre que près de 80% de la population de la grande région se répartit entre trois grands types de territoires : 23% dans le type 5, territoires de vie plutôt denses en situation peu favorable, 29% dans le type 6, territoires de vie de bourgs et petites villes en situation intermédiaire et 27% dans le type 7, territoires de vie isolés, peu urbanisés, hors de l'influence des grands pôles. C'est-à-dire des populations d'électeurs qui ont surtout donné leur préférence électorale à la droite et à la droite extrême lors du scrutin des présidentielles de 2012.
La gauche dans son ensemble (Hollande / Mélenchon) ne puise ses voix que dans un réservoir réduit à 40% d'inscrits sur les listes électorales (contre un réservoir de 79% d'inscrits sur les listes électorales pour la droite et la droite extrême Sarkozy / Le Pen et un réservoir de 45% d'inscrits sur les listes électorales pour la droite classique Sarkozy / Bayrou) ce qui permettrait de ''prédire'' mécaniquement la défaite de la gauche.
Sur le plan qualitatif, il est intéressant de se pencher sur la nature des territoires dans lesquels les trois grandes configurations politiques tirent leurs électeurs.
Les 3 viviers des "territoires" de la gauche.
Le vote de gauche est principalement nourri par les populations ( mesurées par les inscrits sur les listes électorales ) de trois types territoires différents ; le type 5, territoires de vie plutôt denses en situation peu favorable (23%) ; le type 8, celui des territoires de vie autour des villes moyennes offrant des emplois et des conditions de vie plutôt favorables (12%) et le type 2, territoires de vie plutôt favorisés à l'accès aux équipements rapide mais avec des difficultés socio-économiques (5%). Dans les types 8 et 2, le vote de gauche est mis en concurrence avec l'abstention. Dans le type 5, le vote de gauche est mis en concurrence avec le vote de droite et de la droite extrême.
Les 3 viviers des "territoires" de la droite.
Le vote de droite est principalement nourri par les populations de trois types territoires différents ; le type 4, territoires de vie plutôt aisés, éloignés de l’emploi, situés surtout dans le périurbain (4%), le type 6, territoires de vie de bourgs et petites villes en situation intermédiaire (29%) et le type 8, celui des territoires de vie autour des villes moyennes offrant des emplois et des conditions de vie plutôt favorables (12%). Le type 4 vote essentiellement Sarkozy / Bayrou. Dans le type 6, le vote de droite est mis en concurrence avec celui de la droite-extrême (Le Pen). Dans le type 8, il est mis en concurrence avec le vote de gauche (Hollande / Mélenchon) et l’abstention.
Les 3 viviers des "territoires" de la droite et de la droite-extrême.
Ces votes sont principalement nourri par les populations de trois types territoires différents ; le type 5, territoires de vie plutôt denses en situation peu favorable (23%), le type 6, territoires de vie de bourgs et petites villes en situation intermédiaire (29%) et le type 7, territoires de vie isolés, peu urbanisés, hors de l'influence des grands pôles (27%). Dans le type 5, il y a une mise en concurrence avec le vote de gauche (Hollande / Mélenchon) et avec l'abstention. Dans les types 6 et 7, les votes de droite et celui de la droite-extrême se concurrencent entre eux.
Les deux questions vives à poser semblent être les suivantes : tout d'abord, en cas de défaite du PS, quelle sera l'ampleur de celle-ci ? Ensuite, la (probable) première place de la droite (Les Républicains / ex-UMP) à l'issue du scrutin sera-t-elle rudement acquise ou pas ? Finalement pour ces deux questions, la véritable interrogation sera celle de l'écart des deux formations politiques (le PS ; les Républicains/ex-UMP) face au RBM-FN ? Ce que nous ne pouvons évidemment pas prédire électoralement, mais que nous avons pu approcher sur un autre plan à travers la question de la qualité de vie des territoires en Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine ; cette caractérisation par la qualité de vie des territoires renvoie à des familles d'électeurs aux demandes très disparates.
Pour ne pas conclure gardons à l'esprit deux dimensions du politique : « détenir le pouvoir use » d'une part et rappelons nous que « la roue finit toujours par tourner » d'autre part. Ce qui sera sans doute visible lors du prochain scrutin électoral des régionales 2015.
Pascal Politanski
Diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques
Ovipal (Version du 6 octobre 2015)
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