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Pour contrer l’offensive des départements sur l’économie, la région grand-est joue la carte de l’identité alsacienne…

 

Décidemment, depuis 2013 et l’échec du conseil unique d’Alsace, le thème de l’avenir de l’Alsace ressemble à une série télévisée mettant en scène différents protagonistes jouant dans des épisodes qui se suivent mais où chaque nouvel épisode apporte son lot de nouveautés par rapport à l’épisode précédent.

 

Dans l’épisode numéro 3 – l’épisode en cours – le sommet de l’Etat, incarné par Emmanuel Macron, n’est désormais plus opposé à la constitution d’une entité administrative alsacienne, disposant de compétences élargies, à condition que celle-ci se fasse sans modification de la carte des grandes régions, mise en place au cours de l’épisode numéro 2. L’annonce par le sommet de l’Etat de ce nouveau cadre de discussion a eu pour effet d’affaiblir l’intensité de la revendication alsacienne de sortie du Grand-Est et de recentrer le débat sur les transferts de compétence qui pourraient avoir lieu de la région grand-est ou même éventuellement de l’Etat en faveur d’un département alsacien, qui devrait naitre de la fusion des départements des Bas-et-Haut-Rhin.

 

L’économie, principale revendication des départements

 

Dans le cadre des négociations qui viennent de s’ouvrir dans le cadre de cette nouvelle base, le principal point de désaccord porte sur l’économie et le tourisme, que les présidents des conseils départementaux Frédéric Bierry et Brigitte Klinkert revendiquent pour le futur département alors que le président du conseil régional Jean Rottner souhaite conserver ces compétences à la région Grand-Est tout en évoquant l’idée d’une possible collaboration avec les départements dans ces domaines-là.

 

En fait cette focalisation sur l’économie constitue la reprise du conflit, né à l’épisode numéro 2, autour du rôle et du financement de l’ADIRA, l’agence alsacienne de développement. L’ADIRA est née en 2016 à partir de la fusion des agences départementales bas-et-haut-rhinoises. Ses principaux financeurs restent à l’heure actuelle les deux départements alsaciens. Cette fusion, correspondant à une logique de conseil unique d’Alsace (épisode numéro 1), mais effectuée au moment de la mise en place du grand-est (épisode numéro 2) en dépit de l’échec du projet de conseil unique, était une façon pour les présidents des conseils départementaux d’affirmer une compétence alsacienne en matière d’aide aux entreprises – sur une base qui ne pouvait désormais être qu’interdépartementale –alors que la loi NOTRe d’août 2015 avait en principe pour effet d’empêcher les départements d’exercer cette compétence.

 

La loi NOTRe attribuait cette compétence aux régions et elle retirait aux départements la compétence générale (cad la possibilité d’intervenir dans des domaines qui ne leur sont pas attribués de façon spécifique par la loi). Et on se souvient qu’en novembre 2016 le préfet avait déposé un recours devant le tribunal administratif contre un projet de convention entre les deux départements alsaciens et l’ADIRA portant sur la période 2017-2020, recours qui pour l’instant est en cours d’instruction.

 

L’identité alsacienne, nouveau cheval de bataille du Grand-Est

 

Derrière ce débat, en apparence technique, se profile la question de l’identité alsacienne. Et sur ce point, Jean Rottner, par ses prises de position en pointe sur des thèmes directement liés à la langue et la culture alsaciennes, fait preuve d’un savoir-faire certain. C’est ainsi que début décembre 2017, il affirmait avoir interpellé la rectrice d’Académie Sophie Béjean au sujet de la classe en immersion d’ABCM de Haguenau et se disait favorable à ce type de pédagogie (1). Une dizaine de jours plus tard, il annonçait la création d’un « groupe Alsace » dédié à la valorisation de l’identité alsacienne et constitué de personnalités connues dans le domaine de la défense de l’identité culturelle alsacienne.

 

Parmi les membres de ce groupe se trouve Thierry Kranzer, président du FIFAL, fonds international pour la langue alsacienne, crée pour promouvoir la création de classes en alsacien en immersion, et qui par ailleurs avait signé l’appel des Cent en septembre 2017. Et trois jours plus tard, Jean Rottner envoyait un courrier à l’organisation « Tripadvisor » dans lequel il disait regretter la disparition du terme Alsace de son site touristique.

 

Ce positionnement de Jean Rottner sur le terrain de l’identité alsacienne a pour effet d’affaiblir l’impact du discours des départements, qui pour l’instant reste principalement centré sur l’économie et le tourisme. Cette prudence des départements en matière d’identité alsacienne a probablement pour but d’éviter que la revendication alsacienne ne soit assimilée aux revendications corses ou catalanes. Mais d’un point de vue régionaliste, l’économie et le tourisme sont moins mobilisateurs que la langue et la culture. Et si la région est plus en pointe que les départements sur ces questions, à quoi cela sert-il de vouloir renforcer ces derniers ? La suite au prochain épisode.

 

3 janvier 2018

Bernard Schwengler

ovipal

                                                                                                                                                      

 

 

 

 

  • L’association ABCM gère des écoles bilingues français-allemand. Certaines de ces classes, en maternelle, sont des classes en immersion, ce qui signifie que la totalité des activités a lieu en alsacien et en allemand, le français étant introduit à partir du cours préparatoire.

 



05/01/2018
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